dimanche

Le passage de la nuit, Murakami


Que se passe-t-il après les douze coups de minuits ? Mari rencontre un musicien dans un bar, sa soeur partage à son insu le sommeil d'un inconnu... Pour les âmes solitaires d'une ville assoupie, les expériences se succèdent, entre fantasmagorie et réalité. Le lecteur, voyeur protégé par l'obscurité, palpe les rêves inquiétants des acteurs de la nuit. 



Je quitte tout juste les pages du roman et une citation reste. Étrangement, même à l'autre bout du monde, la nuance est là : "Tu sais, nos vies ne sont pas découpées simplement en sombre et lumineux. Il y a une zone intermédiaire qui s'appelle clair-obscur. " 
Le passage de la nuit se résume en ces derniers mots. L'ombre, les rayons de lune, les silhouettes, le flou, l'obscurité de la nuit japonaise. Guidé par une plume délicate, l'auteur transporte ses lecteurs. Comme si nous étions nous-même prisonniers d'une nuit mystérieuse et infatigable. On ne perçoit plus les gens, les rues de la même manière. Tout semble figé dans une poésie indescriptible où chacun passe ; témoin, rêveur ou acteur, peu importe. Puisque l'important est de s'attarder sur les détails, sur le monde transformé par l'intimidante noirceur. 

On croise la route de Mari, Eri, Takahashi, Shirakawa, Koorogi. Eux-aussi, attardés ou perdus dans la nuit. Pourtant ils se détachent des autres silhouettes fuyantes ; ils ont quelque chose en plus. Une étrange lueur en émane. Chacun n'est donc pas là par hasard ; et des liens se tissent entre eux, des liens inattendus et invisibles. Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous
Et puis, on continue notre déambulation. Nous ne sommes qu'un regard qui se pose maladroitement sur des situations. On se demande par moment si nous sommes en train de lire, ou en train de regarder. Peut-être les deux. Murakami joue sur les mots et le lecteur et l'auteur se voient rassemblés dans un "nous", proche d'une caméra : "Notre point de vue aérien s'éloigne de la ville et se déplace au-dessus d'une banlieue résidentielle calme. "

Le roman donne à voir l'univers japonais dans toute sa splendeur. Cette littérature qui a le pouvoir de retranscrire l’éphémère, le fugitif, l'ineffable. Alors, je vous invite à laisser de côté votre regard habituel et habitué pour apprendre à voir autrement. À voir ce qui est partout, sans que jamais personne ne l'aperçoive. À vaciller entre rêve et réalité grâce aux mots experts de Murakami.

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Laisse parler ton côté (clair) obscur.